Histoire du musée
Le musée le Secq des Tournelles est un musée voué aux arts du fer. L'idée d'une telle collection appartint à Jean-Louis-Henri Le Secq Destournelles (1818-1882), peintre formé à Paris et à Rome, devenu un des premiers photographes français. Au titre de photographe il fut requis par Prosper Mérimée pour photographier les monuments historiques de la France, dont Mérimée venait de créer le service (1845). C'est sans doute au fil de ses missions qu'il découvrit les pièces de ferronnerie qui agrémentaient les villes ou les monuments anciens. Il entreprit donc une collection vers 1865.
Son fils, Henry (1854–1925), la continua, avant de l'offrir à la ville de Rouen où il recherchait ses ancêtres (1917). Peu avant, en 1900, cette collection passa sur le devant de la scène, lorsqu' Henry Le Secq prêta près de mille objets à l'Exposition Universelle de Paris (section de Ferronnerie rétrospective). Le Musée des Arts décoratifs de Paris obtint alors d'en exposer une partie (publiée en 1909) : mais la place n'était pas suffisante et le collectionneur préféra Rouen. La ville de Rouen, consciente du patrimoine exceptionnel qui s'offrait là, lui attribua l'église Saint-Laurent, belle église de la fin du XVe siècle sauvée de la ruine en 1893 et restaurée en 1911 (pour le Millénaire de la Normandie).
Le musée y fut inauguré en 1921 : "Le musée Saint-Laurent ouvre ses portes, les visiteurs abondent, les ferronniers d'art trouvent des sujets d'étude, les amateurs des sensations artistiques", écrit le donateur comblé. Jusqu'à sa mort en 1925, il continue à enrichir et à remodeler le musée dont il est devenu le conservateur. Après lui, quelques connaisseurs y ajoutent des pièces de choix : don d'Allemagne (1951), legs Bréard (1951) ou Sangnier-Dessirier (1957). L'ensemble ainsi rassemblé compte aujourd'hui près de quatorze mille pièces. Il offre au visiteur qui se présente à Rouen une saisissante vue d'ensemble des arts du fer (forgé, orfèvré, moulé).
Les collections
L'originalité du musée tient précisément au concept qui a orienté la collection. Jean-Louis-Henri Le Secq des Tournelles s'est en effet rendu compte des ressources infinies de ce métal : le fer permet de fabriquer une plus grande diversité d'objets que tout autre métal, du plus gros au plus menu. Car, travaillé à chaud, il devient aussi malléable qu'une pâte à modeler, tandis que, refroidi, il est d'une dureté et d'une solidité remarquables. Sa maîtrise requiert un apprentissage long et sérieux, ce qui lui vaut souvent sa haute perfection. Le fer est donc utilisé tant pour les gros ouvrages que sont les rampes d'escalier, les coffres-forts ou les grilles de prison, que pour des objets personnels, comme les bijoux, les briquets, les outils ou les accessoires de couture. Il sert tout particulièrement à fabriquer les clefs et les serrures, organes de défense du portail comme du plus petit coffret. Il se découvre enfin dans des pièces d'orfèvrerie, incrusté dans de l'or ou de l'écaille (ce que les Anglais nomment « piqué »).
La collection ainsi rassemblée donne donc à voir tous objets de qualité artistique ou pittoresque réalisés en fer ou comportant du fer. Elle s'étend historiquement de l'époque gallo-romaine au XXe siècle et comporte géographiquement des pièces de toute l'Europe (Allemagne, Angleterre, Espagne, Italie, Pays-bas, Russie), et quelques objets orientaux (pays arabes, Inde…). Des travaux d'art très élaborés (serrures de maîtrise, travaux d'orfèvre) y côtoient de beaux objets d'art populaire (enseignes, marmites). Seules les armes traditionnelles en furent exclues, car déjà collectionnées par d'autres. Les thèmes principaux représentés sont : les enseignes et marques de propriétés, la coutellerie, les outils de métiers, les objets de parure et de plaisir, l'équipement et le décor de l'église, de la maison ou de la porte et notamment les serrures, coffres et coffrets…